2013-01-24_Point sur la BD en bibliothèque

Point sur… la bande dessinée en bibliothèque

24 janvier 2013

Accueil par Mme Rüegger, directrice de la Médiathèque de St Cloud.
Un « point sur » n’est pas une formation par une personne dite savante, mais un échange d’expériences par des professionnels pour des professionnels, sans intervention ou contrôle extérieur de la direction.

Ouverture de la matinée par Guylaine Bureau qui coordonn la commission BD de BiB92
La bande dessinée est un domaine qui prend de l’importance, un genre littéraire mis sur le devant de la scène.
Ce « point sur » sera un échange pratique de connaissances, ainsi qu’un échange d’expériences et de questions.
Les participants désirant recevoir les critiques mensuelles du comité et/ou les Powerpoints des interventions sont invités à noter leur adresse mail.


1) Le monde de l'édition BD
Guylaine Bureau, Saint-Cloud

Quelques chiffres
Le secteur BD représente 8.32 % de la production éditoriale globale. Quatre groupes éditoriaux dominent le marché (pour 310 éditeurs ayant publié de la BD en 2011) : Delcourt, Glénat, Flammarion et Hachette.
5.327 BD ont été publiées en 2011, dont 3.841 nouveautés (38,9 % venant d’Asie).
2.043 BD traduites dont 1.494 venant d'Asie et 364 des Etats Unis
1.058 nouvelles éditions, compilations ou intégrales
224 œuvres datant de plus de 20 ans
31 séries francophones reprises par des nouveaux auteurs
339 arts books
76 revues spécialisées
455 événements autour de la BD

Diversité de genres et de formes
BD asiatique : Japon pour le manga, Chine pour le manhua, Corée pour le manhwa.
BD américaine : comics (regroupant mainstreams ou super héros, les graphic novel, et les comics strips).
BD franco-belge, à laquelle s’associent d’autres pays européens comme l’Espagne et l’Italie.
La BD se réinvente constamment avec de nouvelles formes, comme le roman graphique ou les BD concepts.
Certains éditeurs jouent sur des systèmes « Pieuvre » pour accaparer le lecteur (Le Triangle Secret par exemple).
La BD numérique est balbutiante malgré quelques blogs, édités ensuite en version papier.
Le manque de matrice numérique serait peut-être lié à un manque de support ?

Périodicité
La périodicité de la BD européenne est, malgré quelques exceptions, majoritairement annuelle.
Les productions venant d’Asie sont plutôt bimensuelles.
La production américaine a une périodicité assez chaotique.
60% des titres sortent entre septembre et Noël.

Le lecteur type
Le lecteur type est majoritairement masculin et/ou adolescent.
La BD est confrontée à deux stéréotypes :
- c’est un genre pour les jeunes
- c’est un genre pour « mauvais lecteurs »
Idées fausses, car les lecteurs de BD ont des pratiques culturelles très variées.


2) Pourquoi un comité BD
Anne Ziegler, Saint-Cloud

Le comité BD de BiB92 existe depuis 21 ans. Il a débuté à Bagneux, puis s’est tenu à Neuilly, à Boulogne et enfin à Saint-Cloud. Il est organisé par Guylaine (Espace jeunesse/ados) et Anne (Espace adultes), également responsables en binôme de l’ensemble des acquisitions BD de leur médiathèque.
Il réunit actuellement chaque mois (sauf juillet, août et septembre) des agents de 18 équipements différents.
La participation à ce comité est libre, sans obligation d’assiduité. Il peut être rejoint en cours d’année. Le nombre de titres à analyser est libre, selon les contraintes et envies de chacun. Environ une soixantaine d’ouvrages, tous genres confondus, sont analysés à chaque rencontre.
L’office est proposé et présélectionné par le libraire de La Librairie des Enfants (Versailles), qui participe également au comité, apportant un point de vue différent. Ce travail représente une lourde charge pour le libraire : en cas d’empêchement, les participants sont priés de rapporter ou renvoyer les ouvrages empruntés à la médiathèque de Saint-Cloud, à l’attention de Guylaine ou Anne.
Le fonctionnement en commission permet une confrontation de regards, de savoirs et d’expériences – un éclairage plus large sur le monde de la BD. Les conseils aux lecteurs n’en sont que meilleurs !
Le comité est une aide à la constitution des fonds, en fonctions des publics… et des budgets.
La sélection annuelle des coups de cœur du comité est enfin disponible en PDF sur le site de BiB92 et en édition papier dans les bibliothèques qui le diffusent.
Rêve ou projet ? Les membres du comité réfléchissent à une conservation partagée…

3) Un festival BD : « Les Bulles dans la Ville »
Antoine Rimbert (Antony)

Historique
Le festival est né en 2002 à l’initiative d’un adhérent, pigiste et grand amateur de BD, qui avait envie de monter un événement BD sur la ville. Il a sollicité le directeur et le directeur adjoint de la médiathèque, alors en charge du fonds BD : le projet était lancé.
Deux ans après, cet adhérent créait une maison d’édition, La Boîte à Bulles, à Antony.
L’affiche de cette première édition était de Jean Claude Denis, qui a depuis obtenu le prix d’Angoulême.
La thématique était les animaux dans la BD.
Le festival s’articulait autour de cafés rencontres, de séances de dédicaces et de rencontres avec les scolaires.
Cependant, attirer un large public reste difficile. Les fonds de BD, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ne « marchent » pas tous seuls et, même si les lecteurs de BD sont nombreux, peu se déplacent pour venir écouter un auteur.
L’édition de bande dessinée avait explosé, mais Antony a un public divers.

La forme actuelle du festival
Tout en conservant les animations de ses débuts, le festival s’est enrichi : animations de plus grandes ampleur, concours de BD dont le lauréat bénéficie d’un espace d’exposition d’un mois à la médiathèque.
Le partenariat entre les établissements culturels de la ville est très fort.

Le festival 2012
Thème : « Se souvenir du vingtième siècle ».
Nombreuses actions en amont du festival, dont une résidence d’auteur.
Rencontres avec les collèges et lycées, ainsi qu’un partenariat de lecture/création artistique.
Travail avec une « classe de pays » (classe spécialisée pour enfants handicapés) en ateliers,  où les élèves ont pu s’aider de vignettes prédécoupées par l’auteur pour réaliser une BD.
Le concours de BD n’était d’abord ouvert qu’aux habitants d’Anthony. Aujourd’hui, il est ouvert à tous les franciliens. Une école de BD située à Antony y travaille également.

Le festival 2013
Le prochain festival n’aura pas de thématique. Ce sera un numéro anniversaire « les 10 ans de ». L’invité d’honneur sera Corbeyran et, à travers lui, ses divers auteurs et amis. Chabert a ainsi été choisi pour la réalisation de l’affiche.

Le festival rencontre-t-il un large public ?
Le festival se tenant en grande partie en extérieur, l’été a été la période retenue. La population d’Antony étant assez aisée, beaucoup sont absents. Même si le festival ne touche qu’un public restreint, un festival se construit dans la durée…

Est- il soutenu par la ville ?
Oui, vu que le festival se partage sur divers établissements de celle-ci.

Pas de difficulté pour avoir des éditeurs ou auteurs ?
Via le directeur de la « Boite à bulles », ce qui présente des avantages et des inconvénients, au vu des amitiés et inimitiés du milieu BD.

Quel est le niveau d’implication des scolaires et au niveau du concours ?
Le programme est distribué dans toutes les écoles : beaucoup de réponses positives.
Plus de 50 réponses pour le concours, le plus souvent de planches originales (celles s’appuyant sur les vignettes prédécoupées intéressent moins). La gagnante de l’année dernière ne sortait pas d’école graphique.

Une thématique sur le comics ou le manga un jour ?
Peut être, mais c’est compliqué en raison de la difficulté à accueillir des auteurs étrangers.

Combien y a-t-il d’auteurs invités ?
Six à huit auteurs pour les cafés rencontres.
Et de douze à quinze voir même jusqu’à vingt sur le festival.
Il est rappelé que faire venir des auteurs coûte assez cher même s’il ne sont pas payés : dédommagement des frais de transports, restauration et hébergement.
Il y a de plus 480 festivals en France pour une année de 365 jours, ce qui fait que bien souvent les auteurs ont à choisir entre plusieurs festivals.
De plus, faire de la BD prend beaucoup de temps et ne permet pas toujours de participer à des festivals.

Qui réalise les supports de communication et l’affiche ?
La médiathèque prend en charge la réalisation de l’affiche dès que l’artiste retenu a achevé ses dessins.
La Boîte à bulles prend en charge la communication extérieure.
Cette année cependant, la Boite a bulle sera remplacée par le service info-com de la ville.
Il y a eu des flyers la première année, mais plus après.

Comment sont choisis les auteurs des affiches ?
En fonction de la thématique et en partenariat avec la Boîte à bulles, ce qui doit évoluer.
C’est toujours un jeune auteur qu’ils avaient voulu mettre en avant.
Cette année, comme l’invité d’honneur était Corbeyran, c'est un des « ses » auteurs qui a été choisi.

Quel genre de public fréquente le festival ?
Les adolescents pour le concours, sinon majoritairement un public familial.

4) Création d’un fonds patrimonial BD à destination du public
Yannick Le Guinio (La Garenne-Colombes)

Contexte
Un bâtiment neuf, avec des aménagements en cours.
Les prêts de BD représentent ¼ de l’ensemble des prêts.
Un dilemme : que faire des ouvrages trop anciens ? Leur mauvais état matériel rebute les emprunteurs, et une mise en réserve équivaut à une « petite mort ».

Création d’un fonds patrimonial empruntable
Ce fonds « test » compte 90 volumes : BD « anciennes »,  rééditions d’anciens ouvrages (Michel Vaillant, Buck Danny,  Tanguy & Laverdure …).
La crainte initiale a été confirmée : l’aspect vieillot et abîmé des documents rebute les emprunteurs, à l’exception des plus âgés, qui empruntent ce fonds par nostalgie.

Yannick présente quelques albums (dont de vieux classiques de la BD américaine chez Futura) et montre l’intérêt des nouvelles éditions de Michel Vaillant (leur dossier supplémentaire). Il assure ainsi qu’on peut pilonner les vieux albums et acheter ce genre d’intégrales à la place.
Il dit penser acheter Crazy Kat et Les pieds nickelés, par exemple.
Ce fonds est présenté comme un fonds d’histoire de la BD, et permet ainsi de réhabiliter d’anciens ouvrages, de leur offrir une seconde vie.

Que deviendra ce fonds après le départ prochain de son initiateur ?
La démarche et l’intérêt du projet ont été expliqués au remplaçant, qui y portera un œil extérieur. La BD est un art qui a une histoire qu’il est important de faire connaître.

Quel devenir pour ce fonds dans un an ou plus ?
Il avoue qu’il faudra sûrement le repenser.

Où est situé ce fonds ?
Situation paradoxale : sous le bac pour les comics et face aux nouveautés, ce qui ne le met pas en valeur. L’achat d’un nouveau meuble a été demandé.

A-t-il pu quantifier ce qui est consulté sur place ?
Il avoue que non mais pense que ce fonds n’est que peu consulté sur place.

Quel est son but ?
Mettre en valeur ces BD afin de leur donner une seconde chance, et, surtout, ne pas pilonner des ouvrages qui sont des trésors de la BD.

Et si cela ne fonctionne pas ?
En ce cas, il aimerait contacter un établissement intéressé par ce genre d’ouvrages.

Et lorsqu’un participant suggère la conservation partagée, il répond que c’est une belle utopie, et que ce ne serait pas la solution pour ce genre d’ouvrages.
La conservation partagée s’adresse de plus à des spécialistes et des professionnels, et non au public des médiathèques.

Remarque dans le public : un participant  dit qu’il préfère que ce genre de volumes soient mélangés à son fonds plutôt que présentés séparément : le taux d’emprunt est ainsi supérieur.
Encore une fois, il explique que ce n’est pas le cas pour son public, et que cela lui permet de racheter des BD en état lamentable, ce qu’il n’aurait pas pu faire sans ce projet.
Il n’aurait ainsi par exemple pas acquis les Bécassine pour un fonds « habituel », alors que c’est celle du fonds patrimoine qui sort le mieux.
Ce fond est seulement en chantier et a encore à être amélioré.
Tout le monde s’accorde pour dire que c’est aussi une histoire de place.

5) Un fonds de BD en langues étrangères
Joël Lechanu (Bagneux)

Ce fonds est issu d’un désir personnel : il a lui-même amélioré son anglais par la lecture de comics en VO, et à donc pensé qu’il pourrait en être de même pour d’autres.
Ce fonds est né d’un don de comics en format TPB (Trade paper back, sorte d’albums cartonnés) et d’Essential (sorte d’intégrales en noir et blanc). Il a été complété par un petit achat de BD française en d’autres langues. Aujourd’hui, ce fonds « s’exprime » en  allemand,  anglais, russe, espagnol, italien, portugais, arabe, japonais et même breton !
Ce fonds est donc composé à la fois de BD en langues originales et de BD traduites en langues étrangères.
La communication entre collègues et l’importance croissante de ce fonds sont des facteurs clés au niveau du taux d’emprunt.

Ce fonds est-il classé avec les livres en langues étrangères ?
Non, ce fonds est réuni dans un meuble spécifique, dans l’espace BD.

Y a-t-il des BD originales ?
Oui : manga, comics, quelques BD allemandes, une russe et Blacksad en espagnol

6) Questions diverses

Un participant parle de « réserve active ». Tous s’accordent pour dire que c’est une bonne solution. Antoine d’Antony le fait pour les manga et Joël de Bagneux pour de vieilles séries.

Antoine apporte une précision sur les bandes dessinées numériques.
Il cite par exemple la sortie des Webzine comme « mauvais esprit », et évoque des projets éditoriaux sur le net par les auteurs reconnus. Il y voit une certaine méconnaissance des éditeurs, la peur des auteurs envers les éditeurs, et une certaine forme de liberté.

Quid des des offres de BD numériques  pour les bibliothèques ?
Yslaire aime à présenter ses nouvelles séries et créations avec une extension via le net.
Les éditeurs américains (Marvel en tête) délivrent des copies numériques dans le prix de leurs comics papier.
Mais personne ne peut répondre plus précisément à la question.

Question du classement des BD, pour une meilleure visibilité et accessibilité :
- 6 établissements les classent par scénaristes
- 6 par illustrateurs
- 1 par éditeurs, puis par ordre alphabétique de séries
A Saint-Cloud, le classement est fonction des différents espaces :
- par illustrateurs pour les adultes
- par héros pour les ados
- par séries pour les 8 – 12
- par genres musicaux pour les BD en espace musique

http://www.enssib.fr/forums/echanges-dexperiences/classement-physique-des-collections-bd-ado-adultes

Le « point sur… » se termine par une collation, moment convivial de libre discussion.