SYNTHESE DE L'ENQUÊTE SUR LES ACCUEILS DE CLASSE EN MEDIATHEQUE
Adaptation écrite du compte rendu effectué lors de la réunion du 17 juin 2010
BIB92
Données brutes à télécharger ici
Présentation
L'enquête, envoyée sous forme de questionnaire par Internet aux bibliothèques membres de
BIB92, a été conçue pour tenter de cibler les questions essentielles autour des accueils de classes et
permettre de réfléchir aux missions des bibliothèques en partenariat avec l'Éducation nationale ainsi
qu'aux moyens pour évaluer leurs objectifs respectifs.
Pour ces raisons et pour laisser la place à la discussion lors de la réunion, l'enquête :
– n'avait pas pour but de rendre compte de manière exhaustive des modalités de
fonctionnement de chaque bibliothèque
– ne permettait que des réponses assez courtes
– ne peut être considérée comme une enquête à caractère scientifique (pas de définition
au préalable d'un panel représentatif)
Intérêt des résultats
Les résultats de l'enquête peuvent néanmoins être considérés comme valables et utiles pour
plusieurs raisons :
– une concordance assez nette dans les réponses des différentes bibliothèques (on peut en
détacher des grandes lignes interprétatives)
– une concordance avec les résultats d'enquêtes nationales
De plus, comme toutes les bibliothèques n'ont pas répondu, on peut considérer que celles qui ont
pris le temps de le faire ont des questionnements similaires concernant les accueils de classes au
sein de leur structure. Les questions posées faisaient donc écho à leurs préoccupations et peuvent
être considérées comme pertinentes pour le cas qui nous occupe.
Bibliothèques ayant répondu au questionnaire
14 villes (dans l'ordre d'arrivée des réponses)
Malakoff, Clamart, Antony, Colombes, Saint-Cloud, Nanterre, Bourg-la-Reine, Ville d'Avray,
Boulogne, Le Plessis-Robinson, Sceaux, Montrouge, Fontenay-aux-Roses, Châtillon
20 réponses
Certaines villes ont envoyé plusieurs réponses (annexe et bibliothèque principale)
– Nanterre (dispose d'une personne coordonnant les services jeunesse)
– Boulogne
– Clamart (dispose d'une personne coordonnant les services jeunesse)
Les résultats de l'enquête (résumé et tableau complet) se trouvent sur le site de BIB92.
Les personnes intéressées par l'outil ayant servi à l'enquête (formulaire Google) peuvent s'adresser à
Tony Di Mascio pour plus de renseignements (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.)
Principaux résultats
1. Le rapport avec l'Éducation nationale
Toutes les bibliothèques qui ont répondu au questionnaire reçoivent des classes.
Les classes reçues sont principalement des classes de l'école élémentaire avec une forte
proportion de primaires (majorité de cycle II et III) puis viennent ensuite quelques classes du cycle I
(Petite et moyenne section de maternelle).
Les classes du secondaire sont peu accueillies dans les médiathèques concernées puisque les
collèges ne représentent que 35 % des réponses et les lycées 20 %.
Certaines bibliothèques ont tenu à signaler l'accueil de groupes spécifiques comme les IMP
(Instituts-médico-pédagogiques), les classes de SEGPA (Section d'enseignement général et
professionnel adapté) ou des groupes d'enfants sourds.
La plupart des bibliothèques reçoivent un nombre assez considérable de classes puisque 9
d'entre elles répondent en recevoir en moyenne de deux à quatre par semaine et 7 affirment en
recevoir plus de quatre.
Malgré ce nombre assez conséquent d'accueil, le rapport des bibliothèques avec le monde de
l'Éducation nationale semble assez distant :
- 15/20 répondent n'avoir aucun contact avec IEN (Inspection de l'Éducation nationale) ni
même avec les CPC (conseillers pédagogiques de circonscription). Une seule médiathèque
prépare les projets avec eux, 3 les tiennent simplement au courant des propositions.
- 14/20 répondent que l'accueil de classe n'est pas systématiquement préparé en amont avec
l'enseignant accueilli.
- seulement 2/20 répondent que l'enseignant participe à l'accueil de sa classe lors de la venue
à la bibliothèque (ce sont majoritairement les agents et les assistants qui prennent en charge
les classes pendant la visite).
- Dans la plupart des cas, l'enseignant inscrit sa classe à une animation proposée dans un
programme mis en place par la bibliothèque (ce cas se présente deux fois plus souvent
qu'une commande de l'enseignant ou qu'un projet construit en commun avec les
bibliothécaires).
Conclusion et questionnements concernant le point 1
Les réponses concernant le rapport avec l'Éducation nationale soulèvent un paradoxe : toutes les
bibliothèques ayant répondu reçoivent des classes, donc des élèves sur le temps scolaire,
accompagnés de leurs professeurs mais le principal interlocuteur, l'Éducation nationale, semble être
inexistant, ou du moins très peu pris en compte.
Est-ce dû à une méconnaissance du fonctionnement de l'Éducation nationale?
Est-ce une mise à l'écart volontaire ou un incapacité à travailler en commun ?
Si c'est le cas, pourquoi ? Que doit on en penser ?
Peut-on en tirer des conclusions sur les incompréhensions ou problèmes d'organisations qui
reviennent souvent dans les rapports entre enseignants et bibliothécaires ?
Pourquoi y-a-t-il une telle disproportion entre les accueils du primaire et ceux du
secondaire ?
Pourquoi recevoir tant de classes en méconnaissance du travail des enseignants ?
2. Le contenu des accueils de classes
Malgré le fait que les bibliothèques soient devenues, pour la plupart d'entre elles, des
médiathèques, le livre reste le support le plus présent lors des accueils de classes (tous les
répondants disent utiliser des livres lors des accueils).
L'utilisation des autres supports ne semble pas être rentrée dans les pratiques systématiques
des bibliothèques lors de ces accueils. 4 disent utiliser des DVD, 9 des CD, 5 du matériel
multimédia.
D'autre part, la fiction est mise en avant prioritairement (90% des réponses) et la
bibliothèque comme lieu de ressources documentaires est étrangement sous-utilisée.
L'animation principale lors de l'accueil se compose d'une lecture et/ou d'une présentation
d'ouvrages effectuées toutes deux par les bibliothécaires.
D'autres types d'animations sont ponctuellement cités :
– des travaux manuels (proposés dans le questionnaire)
– des temps d'échanges avec les enfants
– de l'initiation au classement
– des jeux documentaires
– des questionnaires thématiques
– du conte
– etc.
Il est à noter aussi que pour ces accueils, 11 réponses précisent que les intervenants n'ont pas
reçu de formation particulière pour les effectuer, une seule réponse signale que l'intervenant a une
formation pédagogique (type BAFA).
Conclusion et questionnements concernant le point 2
Si l'on en croit les réponses sur les contenus des accueils, la bibliothèque semble être médiatisée par
les bibliothécaires principalement comme le lieu du livre de fiction. Ce qui se rejoint les réponses
des publics usagers et non-usagers lors des enquêtes nationales : la bibliothèque reste bien le lieu de
la littérature. Il se pourrait donc que les animations proposées lors des accueils de classes confortent
cette image.
Il ressort également des réponses un second paradoxe (après le lien distendu entre bibliothèque et
acteurs de l'Éducation nationale, voir conclusion du point 1) : la plupart des propositions des
bibliothèques lors des accueils de classes (et donc dans le cadre scolaire) lectures, présentation de
livres sur un thème, initiation à la recherche documentaire, etc. font déjà partie des missions de
l'enseignant.
Est-ce que ces propositions s'expliquent par le fait que les animations ne sont pas préparées
en amont avec l'Éducation nationale ?
Est-ce que ceci explique l'absence d'intervention de l'enseignant lors des accueils (puisque
globalement, le bibliothécaire intervient sur les missions de l'enseignant et donc à sa place) ?
Comment définir l'intérêt de l'accueil et le supplément apporté par la médiathèque ?
Si, globalement, le bibliothécaire effectue une animation de BCD, pourquoi la faire à la
Médiathèque ? Et pourquoi est-elle prise en charge par le bibliothécaire ?
Est-ce que l'image de la bibliothèque donnée lors des accueils ne dessert pas au final la
lecture publique ?
3. Les raisons des accueils de classes et leur évaluation
Les raisons principales données aux accueils de classes sont de faire découvrir le lieu
« bibliothèque », de montrer comment les livres sont classés et aussi de faire découvrir des
textes.
Pour ce faire, plusieurs modalités sont mises en place, de la simple visite aux projets sur la
durée.
Il semble clair pour les bibliothécaires qu'ils n'ont pas à se préoccuper des programmes
scolaires puisque 14 affirment que les visites n'ont aucun lien avec les programmes.
En ce qui concerne les objectifs (des bibliothécaires) lors des accueils, ils semblent être
davantage d'ordre qualitatifs que quantitatifs : on souhaite faire passer des informations,
donner le plaisir de lire, faire parler de ses lectures, faire en sorte que les enfants
« apprivoisent » le lieu, qu'ils le connaissent.
Une bibliothèque n'hésite pas à affirmer que si les enfants ne venaient pas à la bibliothèque
avec leur classe, certains ne viendraient jamais.
11 bibliothèques répondent avoir défini des objectifs pour chaque classe accueillie, mais,
étrangement, 15 précisent qu'elles n'ont pas mis en place d'outils d'évaluations précis pour juger de
la réussite de leurs objectifs.
Quand des outils ont été mis en place, il servent à vérifier l'impact des accueils sur la
fréquentation de la bibliothèque (3 réponses) ou l'utilisation des documents pas les jeunes (2).
Globalement, on évalue l'impact de la visite sur l'année en cours (9 réponses), un an après
(5) plus rarement sur plusieurs années (3).
Quant au temps passé autour des accueils de classes, pour 9 bibliothèques, la préparation, la
visite et le bilan prennent moins de deux heures en tout, pour 7 autres, cela prend entre deux et
quatre heures. Il semble donc que le temps soit principalement utilisé pour l'accueil en lui-même.
Conclusion et questionnements concernant le point 3
Les objectifs concernant les accueils de classes sont relativement flous et plus proches du voeu
pieux que du réel objectif. Ceci est conforté par le fait que, même si la plupart des bibliothèques
disent avoir des objectifs, elles sont bien conscientes dans le même temps qu'elles n'ont pas mis en
place les moyens de les évaluer ni forcément pris le temps de le faire.
Pourquoi y a t-il une telle difficulté à mettre en place des objectifs précis et à les évaluer ?
Est-ce un problème de temps, de volonté, de compétences ?
Comment peut-on proposer des actions pertinentes alors que nous n'avons visiblement pas
mis en place des outils pour juger de leur pertinence ?
Il est peut-être bon de rappeler en conclusion que les fréquentants des médiathèques sont ceux qui
ont intégré les codes du lieu. Ceux qui ne fréquentent pas et/ou qui ne sont pas lecteurs associent la
bibliothèque au monde scolaire et à la lecture. Le lieu n'est donc pas perçu comme un lieu de vie, un
lieu qui correspond à leurs besoins et leurs attentes. Les enquêtes montrent que la massification
scolaire a permis que les jeunes connaissent plutôt bien les équipements culturels de leur ville.
Mais, paradoxalement, les actions mises en place ne font pas rentrer les plus réticents dans une
dynamique d'usager, ne pérennisent pas leurs pratiques. C'est bien la famille, les pairs (en particulier
à l'adolescence), et des rencontres individuelles qui permettent de créer un habitus culturel.
Ces enquêtes (celle effectuée pour la réunion du 17 juin en fait modestement partie) devraient nous
interroger sur notre positionnement professionnel, sur l'image que nous donnons des bibliothèques,
et sur les services que nous devons rendre à tous les publics. Le fait qu'une trop grande proximité
avec le monde scolaire ait un effet contraire à celui recherché dans l'usage des bibliothèques devrait
aussi nous pousser à réfléchir aux modalités d'accueils des individus comme des groupes au sein de
nos établissement.
Les résultats de l'enquête menée pour la réunion sur les accueils de classes permettent d'interroger
un certain nombre de nos pratiques. Les réponses semblent montrer que la plupart des accueils de
classes en bibliothèque sont mis en place sans tenir compte ni du contexte scolaire (peu de travail
avec l'Éducation nationale), ni des besoins des enfants (en tant qu'élèves ou en tant qu'individus :
qu'apprennent-ils à la bibliothèque ?) mais plutôt à partir de convictions des bibliothécaires qui,
malgré un certain malaise quant à ces accueils, éprouvent une difficulté à remettre en cause leurs
pratiques.
Quelques pistes semblent se dégager néanmoins pour améliorer les choses. Il semble nécessaire
d'entamer :
- une véritable réflexion sur la complémentarité entre école et bibliothèque
impliquant un travail en commun avec les partenaires
- une redéfinition de notre métier, de nos missions et de la formation que cela
implique
- une mise en place d'outils d'évaluation des actions
Cela peut bien entendu se faire au sein de chaque structure, mais la mise en place de groupes de
travail, éventuellement pas le biais de BIB92, pourrait s'avérer fructueuse.