Compte-rendu de la table ronde
Lieu : la salle polyvalente de la Bibliothèque principale de Courbevoie
Animatrices : Marie-Laurence Le Cardinal (Boulogne) et Sophie Caillieux (Meudon)
Voici le détail des actions menées dans les structures participantes à cette table ronde :
Antony :
Présentation de Catherine Vosgien et Paul Dauga : le fonds FAL est accessible à partir de 6 ans, la présentation se fait toujours en facing, avec une cote spécifique, qui parle tout de suite aux usagers. Antony possède un centre de transcription de livres braille, un centre braille et un espace braille gérés par des bénévoles. La médiathèque accueille des CMPP (centres médico-psycho-pédagogique d’enfants non scolarisés) et des classes ULIS et 4 groupes d’enfants issus de ces structures sont accueillis 8 fois dans l’année autour de séances de lecture ou d’ateliers de bricolage scientifique. Accueil d’un groupe d’adolescents (8 à 10) d’un EMPro et de 2 éducateurs : 9 séances par an, autour d’un album sans texte, les ados devaient inventer le texte et les bibliothécaires faisaient un montage sur les illustrations en utilisant les voix des ados => ensuite un film a été créé. Les prêts, les envois postaux et les inscriptions sont gratuites pour le braille. Accueil de stagiaires et/ou de vacataires porteurs de trisomie ou de handicaps psychiques, à l’année, grâce à l’obtention d’heures de vacation ou à court terme. Ces accueils sont assez chronophages et font l’objet d’une demande de coaching de la part des bibliothécaires auprès d’un professionnel issu des SESSAD ou de l’UNAPEI.
Formations proposées : mise en place de formations sur la santé mentale sur 2 jours pour les bibliothécaires, dispensées par la PSSM (Premiers Secours en Santé Mentale) https://pssmfrance.fr/.
Conseils : concernant l’accueil de stagiaires, le meilleur moyen de les connaitre est de les côtoyer et d’avoir toujours un référent pour les accompagner dans leurs tâches. Nécessité de bien former les collègues bibliothécaires et de les accompagner avec des infirmières et des animateurs => réunion avec présence obligatoire pour les bibliothécaires afin de leur présenter les handicaps.
Boulogne :
Présentation de Marie-Laurence Le Cardinal : qui est référente lecture publique et actions hors-les-murs. Elle se rend sur des sites dédiés au public senior (clubs sénior, résidences séniors…) et travaille avec les EHPAD, l’UNAPEI 92, elle se positionne sur les animations à l’extérieur et participe à des fêtes de quartier. Elle travaille sur la construction de projets culturels, elle anime des conférences sur le cinéma, l’histoire locale de Boulogne-Billancourt, elle se positionne sur des animations transversales comme par exemple une conférence à deux voix en partenariat avec le Musée des Années 30. Elle travaille actuellement sur les JO de Paris 2024 et anime une séance de conte pour les personnes handicapées, qui a lieu une fois par mois : les résidents choisissent le thème de la lecture et ce thème est couplé avec l’atelier de l’art-thérapeute : en fin d’année, une exposition est réalisée et donne lieu à un catalogue regroupant toutes les œuvres créées à cette occasion. Depuis 2005, sont proposés, à l’amphithéâtre de l’Espace Landowski (350 places) la diffusion des films en audiodescription avec le sous-titrage sourds et malentendants.
Formations proposées : s’appuyer sur la mission handicap et la commission santé mentale de la Ville si elle existe et avoir recours aux associations locales. Formation sur une demi-journée sur le grand âge, dispensée par des gérontologues et des psychologues de l’hôpital Ambroise Paré et via la commission santé mentale de la Ville et les associations.
Conseils : c’est parfois compliqué de travailler avec les EHPAD si les bibliothécaires n’ont pas de contact à l’intérieur de ces structures. Avoir confiance en soi, connaitre le terrain, être partenaire des personnes qui vous accueillent, sa devise « Le monde est petit et le hasard est grand » (Henri Decoin).
Cible 95 :
Présentation d’Hélène Nicolas (excusée) : cliquez ici pour voir sa présentation.
Courbevoie :
Présentation de Jean-Claude Hanol : les bibliothèques sont les équipements pilotes de la ville sur le handicap mental => mise en place d’une signalétique adaptée avec un choix adéquat de dessins, de couleurs, de calligraphie. Ce travail a été mené en partenariat avec les bibliothécaires et les usagers porteurs de handicap, il existe parfois des limites pour rendre la signalétique adaptée à tous. Il y a 3 personnes référentes handicap sur Courbevoie, 10 EHPAD pour 90000 habitants et les membres de l’association Perce-Neige fréquente tous les mardis la bibliothèque avec des animateurs pour emprunter des documents. Un projet est actuellement en cours avec l’association Valentin Haüy, Courbevoie prête des liseuses, possède un service de portage à domicile, propose des ressources numériques comme le streaming suite au gel des achats de textes-lus adulte. Chaque année, Courbevoie organise une sensibilisation au handicap qui réunit tous les acteurs de la ville : Handi-partage, qui propose par exemple une heure du conte accompagnée d’un interprète en LSF (financé par la ville) => ce sont des actions peu compliquées à mener et qui permettent d’élargir le public de la médiathèque. Jean-Claude Hanol attire également l’attention des participants sur l’accessibilité du bâti : là encore, la France est en retard sur la mise en conformité des bâtiments. Courbevoie a développé une application de jeux intergénérationnelle pour étoffer son offre à destination des publics éloignés et pour conquérir le public jeune.
Conseils : bien faire la distinction entre FAL et FALC, à Courbevoie, un groupe composé de bibliothécaires et de personnes porteuses de handicap a validé les textes écrits en FALC, au cours de réunions qui ont eu lieu tous les 3 mois. Editeur FALC : Kiléma éditions (https://www.kilema.fr/). La définition des publics empêchés/éloignés est très différente selon les collectivités.
Gonesse :
Présentation de Cindy Lim : un partenariat a été entamé entre le réseau des médiathèques, la mission Santé/seniors/handicap et la mission Culture/Maisons des habitants de la ville autour de la LSF. Ces structures ont fait appel à un prestataire afin d’organiser un café-signe. Au mois de mai, dans le cadre de la journée des langues, organisation d’actions inclusives par exemple autour des Mots Tordus et grâce à cela, différents élus ont été touchés ! Il y a aussi des actions/partenariats menés avec la BDP95 et un projet de formation générale et spécialisée est en cours de réflexion. Création d’un COTECH (principalement composé des services fonctionnels qui gèrent les ERP, des services qui étudient et réalisent les travaux et des services pilotes de l'Ad'AP (service "bâtiments" et/ou mission "accessibilité") qui a inclut la MDPH dans ses réflexions.
Levallois :
Présentation de Marie-Odile Seyer : les bibliothécaires travaillent avec 5 EHPAD et une résidence sénior. 4 bibliothécaires vont dans les EHPAD une fois par mois et présentent 15 documents et prêtent des documents pendant un mois. Dans la résidence sénior en matinée, les bibliothécaires et les résidents échangent autour de leurs lectures pendant 15 minutes. Les bibliothécaires travaillent également avec un hôpital de jour (les patients viennent sur la base du volontariat, les bibliothécaires ne connaissent pas leurs pathologies) : séance une fois par mois pour un atelier lecture qui regroupe 7-8 patients et un soignant, dans l’auditorium et qui débute par un échauffement de la voix avec des jeux théâtralisés suivis d’une lecture = 9 séances programmées dans l’année. Cette année, le choix des lectures s’est orienté vers le théâtre : les retours sont positifs, les patients lisent la pièce sur des Ipad. Pour la 2e année consécutive, travail avec un ESAT : 4 bibliothécaires les accueillent 1 fois par mois, autour d’un thème précis qui varie à chaque séance (par exemple, lecture d’albums que l’on peut projeter). Présence d’un fonds grands caractères et d’un fonds EJA.
Conseils : pour les EHPAD, les bibliothécaires rencontrent de grosses difficultés à continuer le partenariat s’il y a des changements/des départs d’animateurs, souvent le lien est rompu et le partenariat n’est pas repris.
Meudon :
Présentation de Sophie Caillieux : travail en cours sur les collections => création d’un fonds EJA en section jeunesse (Edition Jeunesse Accessible) : pour plus d’informations, consulter (https://www.signesdesens.org/) + fonds FALC en section adulte => projets à l’état embryonnaire pour le moment). Sur la signalétique => travail en cours de nos collègues qui s’occupent de la communication à la médiathèque, avec le choix de la Police : Atkinson, accessible aux DYS, mal-voyants. Sur les animations => accueil du Foyer Paul Vernon (5 personnes porteuses de handicap mental, dans le cadre du projet de leur établissement, orienté sur « aller vers les autres ») = retour extrêmement positif des éducateurs qui assistent au changement des résidents lorsque ces derniers sont à la médiathèque (par rapport à celui qu’ils ont à l’intérieur du foyer) : ils sont plus ouverts, plus bavards. Les bibliothécaires les accueillent le mardi, une fois par mois, sur la médiathèque de Meudon-centre pendant une heure : des coloriages, des lectures, des écoutes de CD, l’accès au piano numérique, un billet d’humeur (c’est-à-dire que les résidents sont invités à partager une anecdote de leur quotidien à chaque ouverture de séance) sont proposés et parfois une séance est délocalisée à l’Ecole du numérique ou au Musée d’Arts et d’histoire de Meudon. Un projet de partenariat avec le FAM (Foyer d’accueil médicalisé) de Meudon-la-Forêt est actuellement en cours de réflexion pour accueillir des adultes autistes. Sur le côté RH => accueil de 2 stagiaires porteurs de handicap mental et physique dans le cadre de leur projet professionnel et chaque année, participation au Duoday avec l’accueil de stagiaires et au sein de l’équipe de la médiathèque, nous travaillons avec une collègue porteuse de handicap mental et qui a en charge l’équipement de tous les documents. Sur le catalogage, sur le SIGB Syracuse d’Archimed : zone 205$a ou 300$a utilisées pour mentionner les sous-titres pour sourds et malentendants, audiodescription et zone locale 900$a (données d’usage) utilisée pour mentionner le public DYS.
Conseils : prendre en compte la fatigabilité des publics porteurs de handicap, savoir s’adapter rapidement, ne pas être choqué par leur franchise parfois désarmante, ne pas craindre d’être tactile et d’être touché, être bienveillant, s’ouvrir à l’autre pour apprendre énormément sur soi-même.
Présentation d’Aurore Couturier : animations effectuées dans les unités protégées des EHPAD (résidents ayant Alzheimer ou maladies apparentées), par un binôme de bibliothécaires. 2 collègues puis 5 collègues assurent ces accueils et se sont formés auprès d’une psychologue de France Alzheimer. Les animations se déroulent dans 2 EHPAD meudonnais, 1 fois par mois et en alternance, les séances se déroulent auprès de 6 à 7 résidents car nécessité d’avoir des animateurs et des aides-soignants pour aider lors de ces séances. Séance de 45-50 minutes maximum qui débutent par un tour de table autour de thèmes larges, les bibliothécaires proposent des lectures de poèmes, des histoires courtes, ils amènent des objets pour développer les 5 sens, ils chantent et ils amènent des revues pilonnées. Des lecteurs Daisy sont mis à disposition en section adulte et ont trouvé rapidement leur public (400€/pièce).
Conseils : avoir envie d’y aller, travailler en binôme, renvoyer un mail en amont pour rappeler les séances au partenaire, amener des activités avec des niveaux de difficulté différents, rencontrer les psychologues et les animateurs des EHPAD pour mieux connaitre les appétences des résidents. Achat d’un livre pour s’inspirer : Alzheimer autrement : 100 activités pour plus de vie ! La méthode Montessori au service des personnes âgées / AG&D.
Neuilly-sur-Seine :
Présentation de Charles Ham et Christine Lefèvre : la médiathèque a accueilli un binôme composé d’une conteuse et d’un interprète en LSF, hélas, cette animation n’a pas touché le public voulu mais les participants à cette animation ont vécu « un moment magique ». Les bibliothécaires travaillent sur tous les types de handicaps, sur tous les types de publics et d’ailleurs, élaboration en cours d’une charte pour s’y référer et accueillir au mieux les publics concernés. Présence d’un fonds EJA dans la nouvelle médiathèque. Les bibliothécaires interviennent dans 3 EHPAD et insistent sur la variété des publics dans ces structures ; variété également dans les documents présentés aux résidents (livres, revues, CD) et selon ces typologies, les bibliothécaires affinent leurs propositions d’animations pour se caler sur les besoins des résidents. Pour le public atteint d’Alzheimer, ils proposent des animations autour de la musique : ils apportent des Sound-systèmes pour l’écoute et proposent des blind tests. Un club cinéma est proposé sur un autre EHPAD.
Conseils : bien faire attention aux collections DYS car certaines sont de nettement moins bonne qualité que d’autres et lister tous les ouvrages des collections pouvant rejoindre les fonds DYS et qui, à Neuilly, sont des fonds tournants. L’intervention des bibliothécaires dans les EHPAD génère un certain poids politique, qui peut peser positivement sur la mairie.
ANNEXE de Marie-Laurence Le Cardinal : mener une médiation de cinéma en direction des publics séniors
Présentation : animations cinéma dans une médiathèque pilote, travail sur l’accueil, inclusion, intergénérationnel, expérience du terrain (associations, établissements spécialisés…).
Le Manifeste de l’UNESCO préconise de rendre accessible, à tous, les livres et la culture. La principale mission des médiathèques est de répondre à cette demande, en servant de médiateur entre le livre (ou tout autre support) et le lecteur. Depuis quelques années, les établissements culturels enregistrent des baisses de fréquentation dues, entre autre, à la crise sanitaire et aux nouvelles technologies, qui ont modifié le comportement des usagers quant à leur consommation de biens culturels. Pour conquérir, voire reconquérir durablement ces publics éloignés des offres culturelles, quels services doit-on développer ? Quel(s) public(s) viser en priorité ?
Pour tenter d’y remédier, la direction de la Culture de Boulogne-Billancourt a créé, fin 2018, un poste de référent lecture publique hors-les murs, afin de se rapprocher des lecteurs qui ne viennent pas ou plus en médiathèque. Mon expérience du terrain a été un atout pour ma nomination à ce poste. J’ai eu carte blanche pour développer le service, notamment auprès des personnes en situation de handicap et des séniors qui ne se déplacent pas ou peu. J’ai aussitôt pris des contacts intéressants :
-en participant aux salons (Séniors…) et aux fêtes de quartier pour promouvoir les offres des 5 médiathèques du réseau boulonnais.
-en travaillant avec les médiathèques de quartier, autour d’évènements culturels ou de mise en place de services spécifiques (portage à domicile, animations inclusives et intergénérationnelles…).
-en collaborant avec les services municipaux ou territoriaux (Jeunesse, Famille, Communication, Musées, Office du Tourisme, CCAS, Mission Handicap…)
-en développant les partenariats avec les associations locales, les établissements séniors, les foyers UNAPEI 92…
Qu’entend-on par « Publics empêchés/Publics éloignés ?
L’expression « Publics empêchés » apparaît dans les années 1980. Elle désigne l’ensemble des personnes qui n’ont pas accès à la culture et à la lecture du fait d’un handicap, d’une invalidation temporaire (accident…) ou d’un placement en institution (Prisons, EHPAD, Hôpital…). Par la suite, le concept a été élargi, puisqu’on parle aujourd’hui de « publics éloignés » comprenant des critères supplémentaires :
• L’éloignement géographique des centres culturels, notamment en zone rurale, ou pour cause de problèmes de mobilité : les personnes âgées ne se déplacent pas au-delà d’un rayon de 100 à 800 mètres autour de chez elles.
• L’éloignement psychosociologique de personnes qui considèrent que la culture n’est pas pour elles. Elles se sentent dévalorisées du fait de leurs origines modestes, de leur niveau d’études et de leurs difficultés à lire ou à s’adapter aux nouvelles technologies.
• Mêlant ces 2 critères, les primo-arrivants qui ne connaissent ni le pays, ni les offres culturelles parce qu’ils ne maitrisent pas la langue française.
Selon une étude du Ministère de la Culture qui date de 2017, 87% des Bibliothèques municipales ont mis en place au moins une action en direction des publics empêchés. 46% du personnel a été formé à l’accueil et à la mise en place d’actions destinées à ce public spécifique.
Comment créer une animation autour du cinéma pour les séniors ?
Organiser une animation autour du cinéma ne se limite pas à une projection. Les possibilités sont infinies : parler de cinéma ou valoriser l’image, fixe ou animée, est, en effet, primordiale pour stimuler les sens et tisser du lien social. Les seniors sont souvent des personnes seules ou isolées qui, parfois, se coupent d’un monde dont elles peuvent se sentir exclues. Il faut construire un projet viable avec de « bons outils ». On ne travaille jamais seul et notre environnement local et professionnel regorge de services, d’institutions et d’associations qui sont demandeuses de propositions de partenariats. Déterminer qui sont ces futurs partenaires est donc une priorité. Le contact interpersonnel est un rouage essentiel de la construction d’un projet commun : nous avons des propositions à faire, certes, mais sont-elles en adéquation avec la demande des usagers visés ? Les institutionnels savent mieux que nous ce qui peut convenir aux résidents. Dès notre premier rendez-vous, une responsable animations m’a donné une clé : "les résidents ont plus de vie derrière eux que devant : ils n’ont plus le temps pour s’emmerder !" Depuis, c’est avec cette maxime en tête que je mets en ordre mes idées avant de les soumettre à mes partenaires. Il arrive fréquemment qu’un projet naisse d’une rencontre avec un responsable d’institution, ouvert et motivé, surtout dans les établissements à vocation médicale (EHPAD…). Le covid a fermé bien des portes et la confiance n’est revenue que petit à petit. Parfois, le hasard peut jouer un rôle moteur : une célébration, un évènement culturel existant, une exposition nationale ou locale.
Cinéma de Midi et blog cinéma :
Depuis 2017, bibliothécaires et lecteurs se rencontrent un mardi par mois au « Cinéma de Midi » pour partager ses coups de cœur sur les sorties en salle, les films et documentaires plus anciens qu’on a aimé ou détesté. Étaient ciblés au départ, les travailleurs des entreprises voisines venant sur leur temps de pause déjeuner. Un certain nombre de cinéphiles retraités ont rejoint le groupe, au point que sont désormais proposées des séances thématiques, voire patrimoniales. Le compte-rendu est ensuite publié sur le blog cinéma de la ville. Une trentaine de personne assiste régulièrement à ces discussions, souvent passionnées !
Expositions locales :
Boulogne-Billancourt est une ville de cinéma (studios, résidences d’acteurs ou de réalisateurs…). De mars 2022 à janvier 2023, le Musée des années 1930 a mis à l’honneur Jean Gabin avec « Gabin, l’expo ». Plus de 30 000 ont admiré les collections privées issu du fonds du Musée Jean Gabin de Mériel (en travaux), des prêts de la Cinémathèque, des extraits d’actualités, de films et de chansons… Mes collègues du Musée et moi-même, avons assuré, en alternance, les visites guidées pour les clubs séniors de la ville et adaptées aux personnes en situation de handicap. Partenaire de la manifestation, le cinéma Landowski a programmé des classiques de l’acteur. J’ai également proposer des conférences : Gabin et Boulogne-Billancourt une longue histoire commune, Gabin flic ou voyou ? Gabin et ses amis écrivains, Gabin et Simonin font la paire, de Touchez pas au grisbi au Gentleman d’Epsom. L’expérience a rencontré un franc succès auprès des Clubs séniors (3 séances de : Gabin au Jardin au parc Rothschild, en juillet, pour les adhérents qui ne partent pas en vacances, avec une moyenne de 10 personnes, de 2 résidences séniores et de 2 EHPAD (entre 30 et 50 personnes/séance). La doyenne, 108 ans, nous a avoué, le rose aux joues, qu’elle en avait pincé pour Jean Gabin dans sa jeunesse !
Projections en audiodescription :
Chaque mois (sauf juillet et août) sont projetés des films en audiodescription qui ont permis de resserrer les liens tissés avec les associations locales, qu’elles s’occupent des séniors et/ou des personnes en situation de handicap. C’est une collègue, référente handicap qui, en 2005, a créé ce concept : chaque année, à partir du catalogue de notre fournisseur, nous sélectionnons 10 films, soit 1 par mois, présentés en audiodescription pour les usagers malvoyants et sous-titré pour les usagers malentendants, qui sont, en majorité des séniors. Une présentation rapide de l’œuvre programmée introduit la séance, puis le régisseur éteint progressivement les lumières avant de lancer le film. Depuis l’origine, tous les publics, handicapés, valides et jeunes peuvent assister gratuitement à la séance. Ces projections ont lieu dans l’amphithéâtre de l’espace Landowski (350 places, totalement accessibles). Le travail avec les associations a été déterminant. L’inclusion nous tenant à cœur, une bonne dose de pédagogie a été nécessaire pour convaincre les personnes intéressées, que ces séances s’adressaient bien à tout le monde. Les personnes non francophones qui participent à nos ateliers de conversation y viennent. Les cinéphiles également. En moyenne, de 60 à 160 spectateurs (isolés, institutions…), l’influence dépendant du film programmé, du nombre d’accompagnants pour les groupes ou de la météo. Il reste à développer l’accueil intergénérationnel avec les lycéens de la ville en classe cinéma et en filière photo. Le dialogue EST essentiel pour créer, grâce au cinéma, des passerelles et, pourquoi pas, redonner vie à l’esprit ciné-club…
Résidences séniores et EHPAD :
Lors d’un Salon des séniors, la directrice d’une résidence m’a invitée à travailler avec elle pour élaborer un programme d’intervention autour du cinéma. Certains ayant travaillé dans l’univers du cinéma (de figurant à producteur en passant par le montage…), l’enjeu est de taille ! Depuis 2019, je viens sur site proposer un « Ciné-débat », sur un thème choisi par les résidents, parmi les propositions qui leur sont soumises au préalable. Avec, en moyenne, une trentaine de participants par séance, nous avons exploré l’histoire des studios de Billancourt, ceux de Boulogne, des Archives de la Planète du mécène Albert Kahn, de Cinecitta, d’Alfred Hitchcock, de Sergio Leone… documents à l’appui (livres, CD, DVD). La conférence dure une demi-heure maximum, afin de laisser à chacun du temps pour partager ses souvenirs ou poser des questions. Une des résidentes a raconté comment elle avait été engagée par Henri-Georges Clouzot pour figurer dans Le corbeau. Cette expérience lui a permis d’être embauchée par les Studios de Billancourt où elle est restée, évoluant jusqu’à devenir productrice ! La salle étant équipée d’une régie et d’une boucle magnétique, une présentation d’un documentaire a été tentée dernièrement. À la demande des résidents, nous avons organisé une présentation de livres d’artistes, avec lecture des poèmes illustrés. Ma collègue artiste-peintre expliquait les techniques employées pour créer ces œuvres, tandis que je lisais les poèmes illustrés. Cette animation, liant texte et image, a été très appréciée des 65 résidents qui y ont participé. Ayant eu connaissance de ces animations, une autre résidence séniore a voulu se joindre au mouvement. L’organisation interne étant différente, j’ai traité directement avec les résidents responsables des animations pour mettre en valeur le cinéma documentaire. Il s’agit de présenter succinctement le documentaire projeté ce jour-là (entre 50 et 70 minutes). Après la séance, les spectateurs peuvent donner leur avis, poser des questions ou apporter un témoignage. L’interaction est un élément essentiel de ces rencontres. La salle de projection est équipée d’un écran large et d’une boucle magnétique qui assure une écoute confortable. Malheureusement, elle ne permet pas d’accueillir plus de 25 personnes. Concernant les EHPAD (Établissement Hébergeant des Personnes Âgées Dépendantes), il est plus difficile d’y entrer, contraintes d’un site médicalisé oblige. Grâce à la nouvelle responsable animations, j’ai pu organiser 3 séances autour de Jean Gabin dans deux établissements différents et recueillir de nombreux témoignages particulièrement émouvants.
Pour l’exposition Paris-New-York Art Déco à la Cité de l’Architecture, nous avons présenté, mes collègues du Musée et moi-même une séance diaporama sur certaines pièces de cette période, appartenant au Musée des Années 1930 de Boulogne-Billancourt. Cette analyse des oeuvres et ces lectures de textes de contemporains ont été appréciées par plus de 60 participants.
Partenariat médiathèques et foyers UNAPEI 92 :
Depuis 2019, un partenariat a été initié entre une médiathèque de quartier, le réseau Hors-les-murs et un Foyer UNAPEI local. Cette année, le foyer Michelle Darty s’est ajouté à la liste. Le but est de permettre aux personnes handicapées qui ne peuvent pas travailler pour cause de handicap lourd ou de retraite, d’avoir une activité artistique et conviviale plutôt que de rester isolées, dans leur studio. Une fois par mois, je me déplace donc au foyer pour conter des histoires, dont les thèmes ont été choisis à l’avance par les participants. Ces contes, emplis d’images et de symboles, servent à créer des œuvres artistiques (peintures, collages, sculptures, broderies…), réalisées par les résidents-auditeurs et l’art-thérapeute. Nous travaillons de concert pour stimuler les sens, notamment la vue (photos), le toucher et l’ouïe grâce aux CD musicaux qui accompagnent les ateliers d’arts plastiques. Lors de la Semaine du Handicap, le Foyer expose les œuvres réalisées à la Médiathèque de proximité. Les résidents artistes viennent y accrocher et décrocher eux-mêmes leurs œuvres qui visent à changer le regard sur le handicap. Elle est largement relayée par les réseaux sociaux de la ville. Certains résidents, à l’aise avec les outils informatiques et numériques, rêvent de pouvoir animer ces réalisations en 3D. Le foyer assiste régulièrement aux projections de films en audiodescription. Cinéphiles avertis, ils expriment leur opinion et discutent volontiers de leurs coups de cœur.
Clubs séniors :
Les relations avec les clubs séniors existent depuis plusieurs années, sous forme de « clubs lecture » dont les thèmes collent à l’actualité culturelle (Expositions, évènements…). En 2022, une séance a été consacrée à Jean Gabin et à l’histoire du cinéma français classique… Depuis 2021, nous organisons conjointement des sorties au Parc Rothschild pour les inscrits qui ne partent pas en vacances : Juillet au Jardin. En général, il s’agit de contes qui ouvre sur des discussions et retissent le lien social. En 2022, actualité oblige, Jean Gabin s’est invité au Jardin avec 3 conférences : Gabin et Boulogne-Billancourt, Gabin flic ou voyou, Gabin et ses amis écrivains. Proposer des animations pertinentes nécessite d’être à l’affût de ce qui se passe dans les environs, d’anticiper les demandes ou les besoins des usagers, de collaborer avec les professionnels qui connaissent leur public. C’est une expérience humaine qui nous apprend beaucoup des autres et qui nous enrichit. Le champ des possibles est infini, sachant que les idées peuvent naître du hasard ou d’une rencontre pour peu que l’on écoute ou qu’on observe autour de soi. Parler du cinéma apparaît essentiel pour tisser du lien social, favoriser les échanges interpersonnels, voire intergénérationnels. Aussi, ne faut-il pas hésiter à proposer des projections-débats, ou suivies d’un temps de partage et de critiques. Mêler au cinéma tous les arts (littérature, sculpture, peinture, musique, photo…) permet de stimuler les sens et de libérer la parole. Ainsi Les Parlottes Littéraires, présentés par un collègue spécialiste des classiques, se transforment-elles, de temps en temps, en Parlottes textes et images : Gabin et Simonin, Camus et Maria Casarès, Pagnol de la plume à la caméra… Lorsqu’on se rend sur site, notre visite est un évènement important pour les personnes qui ne peuvent plus sortir hors de l’établissement. Il ne faut pas les décevoir et travailler sérieusement et avec la plus grande sincérité. Les personnes âgées sont très directes, elles n’ont pas de temps à perdre. Elles font part de leur mécontentement, mais expriment tout autant leur satisfaction. Et là, c’est extraordinaire ce qu’elles peuvent vous donner, elles vous enrichissent par leur amitié, leurs expériences et leurs souvenirs…
Sachons rester humble, soyons à l’écoute de l’autre, en lui laissant, voire en lui redonnant sa place et sachons partager, donner, écouter, recevoir !